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Le.blog.catholique.de.Véronique (Blog personnel)

S'engager dans une vie de prière : pourquoi ?

28 Janvier 2008, 16:17pm

Publié par lala

S’ENGAGER DANS UNE VIE DE PRIERE : POURQUOI ?


Edith Stein, philosophe juive allemande et disciple de Husserl, est entrée en 1933 au Carmel de Cologne, dans le contexte brûlant d’une Allemagne où le nazisme s’impose. Elle prend au Carmel le nom de Thérèse-Bénédicte de la Croix, creusant là le mystère de la Croix, dans un lien très fort avec son peuple (le peuple juif et le peuple allemand). Elle s’était convertie en 1921 en lisant la « Vie » de Sainte Thérèse d’Avila. En 1933, sa décision, longtemps mûrie, d’entrer au Carmel est sa réponse à la montée en puissance du nazisme, dont elle entrevoit très tôt les conséquences dramatiques. Arrêtée en 1942 au Carmel d’Echt en Hollande, elle meurt le 9 août à Auschwitz. Elle a été canonisée en 1998.
Dans le texte qui suit, Edith Stein fait une synthèse des courants qui agitaient alors l’Eglise allemande, l’un insistant sur la prière intérieure (« subjective ») et l’autre insistant sur la prière ecclésiale et les formes traditionnelles (« objective »). Elle laisse surtout transparaître ce qui constitue le cœur de son engagement au Carmel, dans une vie de prière.
En préparation du dimanche 25 janvier où les Sœurs Adeline et Marie-Hélène vont s’engager (à l’église St-Ignace) en faisant profession perpétuelle au Carmel St Joseph, cette parole est bienvenue.

Qu’est-ce qui donna donc à sainte Thérèse d’Avila, qui consacra à la prière des décennies de sa vie dans la cellule d’un monastère, le désir ardent d’œuvrer pour la cause de l’Eglise et la lucidité pour discerner la détresse et les besoins de son temps ? Précisément le fait qu’elle vivait dans la prière, qu’elle se laissait toujours plus profondément attirer par le Seigneur à l’intérieur du «château » de son âme. C’est pourquoi elle ne put faire autrement que de « brûler d’un zèle ardent pour le Seigneur Sabaoth » (paroles de notre saint père Elie qui ont été retenues comme devise sur le blason de notre ordre).
Dans le secret et le silence s’accomplit l’œuvre de la Rédemption. Dans le silencieux dialogue du cœur avec Dieu, les pierres vivantes sont préparées pour édifier le Royaume de Dieu, les instruments sont forgés pour servir à la construction. Le fleuve mystique, qui perdure à travers tous les siècles, n’est pas un bras isolé et secondaire, qui se serait séparé de la vie de prière de l’Eglise, il est sa vie la plus intime. Lorsqu’il lui arrive de faire éclater les formes traditionnelles, c’est parce que l’Esprit vit en lui, cet Esprit qui souffle où il veut : lui qui a suscité toutes les formes traditionnelles et doit toujours en susciter de nouvelles. Sans lui, il n’y aurait ni liturgie ni Eglise.

L’âme du psalmiste n’était-elle pas une harpe dont les cordes vibraient et chantaient au moindre souffle de l’Esprit Saint ? L’hymne de joie du Magnificat a jailli du cœur débordant de la Vierge comblée de la grâce divine. Les lèvres du vieux prêtre devenu muet s’ouvrirent pour entonner le chant prophétique du Benedictus lorsque la parole obscure de l’ange devint réalité visible. Ce qui est monté un jour d’un cœur comblé par l’Esprit et a trouvé son expression en paroles et en musique se transmet et demeure sur les lèvres. C’est bien l’office divin de veiller à ce qu’il continue de résonner de génération en génération. C’est ainsi que le fleuve mystique forme ce chant polyphonique qui va s’amplifiant sans cesse, louange au Dieu Trinité, à Celui qui crée, qui sauve, qui mène tout à l’achèvement. Il n’est donc pas question de concevoir la prière intérieure, libre de toutes formes traditionnelles, comme la piété « subjective », et de l’opposer à la liturgie qui serait la prière «objective » de l’Eglise.

Toute prière véritable est prière de l’Eglise : à travers toute prière véritable, il se passe quelque chose dans l’Eglise et c’est l’Eglise elle-même qui la prie car c’est l’Esprit Saint vivant en elle qui, en chaque âme unique, «intervient pour nous par des cris inexprimables ». Voilà justement la prière « véritable » : car « sans le Saint Esprit, personne n’est capable de dire : ‘Jésus est le Seigneur’ ». Que serait la prière de l’Eglise si elle n’était l’offrande de ceux qui, brûlant d’un grand amour, se donnent au Dieu qui est amour ?

Edith Stein

« La prière de l’Eglise », 1936,
Source cachée,
Ed. Cerf / Ad Solem, 1998 

SOURCE


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